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Lettre de la Lise
17 janvier 2009

Le Labyrinthe de Pan, analyse plus poussée ^^

Une petite fille qui avait peur de devenir femme.

Attention : cet article contient quelques SPOILERS sur le Labyrinthe de Pan.

Bon, comme promis, je vais essayer de vous soumettre une analyse plus poussée du Labyrinthe de Pan. Dans l’édition DVD que j’ai, Guillermo Del Toro explique qu’il a à plusieurs reprises voulu insérer dans son film des « symboles de l’utérus ». Ainsi, il explique que ce signe apparait sur le lit d’Ofelia et de sa mère et que l’arbre dans lequel entre Ofelia lors de sa première épreuve a aussi une forme d’utérus.

La preuve en images :

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J’avoue que cet aspect du film m’a complètement échappé la première fois que je l’ai vu. Mercredi soir, en le revoyant, j’ai donc tenté d’être plus attentif à ses « symboles de l’utérus » qui reviennent dans le film et j’ai tenté de les interpréter. Selon Bruno Bettelheim, auteur de la Psychanalyse des contes de fées, les contes mettent en scène des enfants, qui en arrivant à surmonter de difficiles épreuves, vont grandir. Je me suis alors demandé si à travers les épreuves qu’elle traversait dans le film, Ofelia ne devenait pas peu à peu une femme. C’est en effet une enfant qui semble être en quête de féminité (comme l’indiqueraient ces différents symboles de l’utérus évoqués plus haut). Telle était donc mon hypothèse de départ mercredi soir, quand j’ai revu ce film. Je n’ai alors eu de cesse de me demander si mon hypothèse était recevable.

vlcsnap_56469Disons le d’emblée, ma réponse est mitigée. Il me semble bien que toutes ces épreuves que traverse Ofelia devrait la faire devenir femme: elle possède sur l’épaule une tache de vin en forme de demi lune et le faune lui dit qu’elle doit se trouver sur le portail qui lui permet d’accéder à un autre monde un soir de pleine lune. Or, la lune est souvent un symbole de féminité : Ofelia est donc invité à quitter son état de jeune fille (la demi lune) pour devenir une véritable femme (la pleine lune). De même, sur le portail, est gravé l’image d’un faune, d’une femme et d’un bébé. Or, quand Ofelia demande au faune qui est cette femme, il lui répond que c’est elle. Elle est donc explicitement invitée à devenir une mère, donc évidemment à grandir et à être une vraie femme. D’ailleurs, il est intéressant de remarquer que celui qui la guide est un faune, créature proche des satyres, donc qui possède une vraie connotation sexuelle : c’est un homme (mâle) qui va l’aider à devenir une femme et non une figure paternelle « asexuée ».

vlcsnap_59088C’est pourtant sous les traits d’une enfant, qui rejoint ses parents, qu’elle revient dans son royaume d’origine. Pourquoi ? N’est-elle pas parvenue à devenir une femme à la suite de cette aventure ? Et si elle a échouée dans sa quête de féminité, comment a-t-elle pu alors franchir le portail qui ne semblait pouvoir s’ouvrir que quand elle serait devenue une femme ? Il m’a semblé qu’il y avait là un paradoxe à creuser car on peut certes penser qu’Ofelia imagine être revenue dans ce monde « féérique » alors qu’elle est en fait en train de mourir. Mais même cette hypothèse ne me semble pas pertinente : il est en effet rare, dans les contes, que le héros doive sacrifier un être innocent (en général, le héros est invité à sacrifier un innocent mais en réalité, il doit refuser de le faire pour réussir l’épreuve initiatique). Finalement, c’est parce qu’Ofelia s’est elle-même sacrifiée qu’elle peut franchir le portail : mais elle y entre en tant qu’enfant innocente et non en tant que femme…

vlcsnap_57498Je vais maintenant me demander en quoi ces différentes épreuves ont pourtant fait grandir Ofelia. Du début à la fin du film, Ofelia semble terrifiée par l’épreuve de l’enfantement. Elle supplie son frère de ne pas faire souffrir sa mère quand il naîtra. Cette idée est même au cœur de sa première épreuve : le crapaud, qui vit au cœur de l’arbre, le fait peu à peu mourir comme son frère qui affaiblit peu à peu sa mère. Quand le faune gronde Ofelia parce qu’elle n’a pas encore été affrontée le monstre dévoreur d’enfants, elle lui explique qu’elle n’y a pas été parce que sa mère est malade. Inconsciemment, peut-être ne veut t-elle pas poursuivre sa quête de féminité parce qu’elle a peur de l’épreuve de la grossesse qu’elle connaîtra peut-être si elle devient femme. Pour elle, l’enfantement est synonyme de souffrance. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer qu’elle « nourrit » la mandragore, qui représente son petit frère, avec son sang : comme si une femme devait nécessairement souffrir pour donner la vie. A sa décharge, il est vrai que toutes les femmes qui enfantent dans ce film, le payent de leur vie : sa mère meurt après d’atroces souffrances lors de son accouchement et métaphoriquement, Ofelia meurt aussi après avoir protégé la vie de son frère/enfant (et comme par hasard, elle a du sang sur son ventre comme sa mère quand elle a failli faire une fausse couche).

Car, à la fin du film, elle accepte ce petit frère, qui a été si dangereux pour sa mère (puisqu’il l’a tué lors de l’accouchement). Elle dépasse alors sa peur de l’enfantement pour accepter d’être une mère pour cet enfant : elle éprouve un certain amour maternel pour lui puisqu’elle refuse qu’il meurt et est prête à se sacrifier pour lui. Néanmoins, ce n’est qu’une étape dans le cheminement d’Ofelia : elle a joué pendant un temps le rôle de mère et pourtant, elle redevient une enfant à la fin du film. Dans les deux « mondes » du film, l’enfant retrouve une mère qui n’est pas Ofélia (dans le monde « réel », il est adopté par Mercedes et dans le monde « féérique »,il est l’enfant de la reine qui ressemble étrangement à la mère d’Ofelia). A la fin du monde, Ofelia n’est pas une femme (si on associe la femme à la figure maternelle) mais elle n’est plus une enfant non plus. Qu’est elle donc alors désormais ? J’avoue que je n’en sais rien -_-. Je vous laisse tirer vos propres conclusions…

Voilà ! J’espère que vous avez pris plaisir à me lire. Comme d’habitude, mon analyse ne se veut pas exhaustive : je suis sûre qu’il y aurait encore beaucoup de choses très intéressantes à dire sur ce film. Je pense par exemple qu’il serait passionnant d’étudier les articulations des deux mondes dans ce film. Moi, je ne l’ai pas fait car c’est surtout l’aspect « conte de fées » de ce film qui me plaisait ^^. Mais si vous avez des choses à rajouter à propos de ce film, des nuances à faire ou si vous n’êtes pas d’accord avec mon analyse, n’hésitez pas à me le dire. J’aime débattre avec des personnes qui n’ont pas les mêmes opinions que moi ^^.

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Commentaires
B
Connaissez vous la légende de pan ?<br /> <br /> A l'origine Pan est l'ange de la mort ,c'est lui qui mène les âmes des enfants vers un lieu dis paradisiaque .<br /> <br /> La troupe d'enfants perdus dont on entends souvent parler n'est autre question les âmes de tous les enfants décédés que Pan emmène avec lui .<br /> <br /> C'est ainsi que dès le début du film j'avais prévue la mort d'Ofélia.
M
Bonsoir,<br /> <br /> Analyses très intéressantes. Dans ma propre réfléxion sur ce film je me suis arrêté au fait que les deux mondes sont totalement liés. Les épreuves féeriques d'Ofelia sont le fruit de son imagination, miroir des épreuves qu'elle-même, Mercedez ou même sa mère endurent dans la vie réelle. La jeune fille qui observe avec ses yeux d'enfants le monde dans lequel elle vit se sent aussi proche de Mercedez qui est une résistante autant que de sa mère qui est la captive d'un tyran. Ofelia, malgré son manque de pouvoir d'agir dans la réalité va résister du mieux qu'elle peut en trouvant sa liberté dans son imaginaire. <br /> <br /> La première mission d'Ofelia s'apparente à celle de Mercedez: récupérer une clé gardée par un être dégoutant qui garde tout pour lui. La deuxième épreuve est celle de ne pas céder à la tentation, au monstre qui incarne aussi le beau père, symbole du mal, de ne pas manger à sa table (la mère d'Ofelia aurait quelque part failli à cette épreuve). Et dans la troisième et dernière épreuve le faune et le beau père ne font qu'un. Sacrifier l'enfant équivaut à le donner au capitaine qui en fera un monstre et Ofelia s'y refuse. En prenant le courage de cette décision elle gagne l'épreuve en méritant sa place dans le royaume qui est évidement celui de la résistance victorieuse mais aussi celui de la mort où elle part rejoindre sa mère et son père.
M
Relu (j'écris beaucoup aujourdhui et laissé séchapper des fautes. Je suis cette Ophélia très mûre psychologiquement mais qui a toujours craint la déformation du corps au moment de la gestation, alors que je voulais un enfant. De méchantes marâtres me disaient, tu as des hanches étroites (pas comme les africaines) et j'en ai déduis que mon corps n'était pas constitué pour être enceinte). Mais j'ai malgré tout vécu ma féminité à travers la peinture, l'écriture, la sculpture (désignés comme le domaine réservé aux hommes,...et la psycho-clinique pour travailler avec les enfants (comme Anna Freud). Quand à ma féminité, j'ai coupé la poire en deux et me suis identifiée à amélie Poulain (amusant je viens de prendre conscience que je suis sagittaire, née un jour de shabbat et de pleine lune. Cet enfant que je n'ai pas eu est dans ma tête (quoiqu'il m'est arrivé en 1984 et 2003 de rêver d'accoucher d'un magnifique bébé; (on se rappoche du signe du cancer (éminement maternel et ma pleine lune s'y trouve,....). Comme la mère de Socrate ou plutôt son fils, j'accouche plutôt le mental,...Lire jacqueline Shaeffer: Comment le féminin vient aux femmes. Sa pratique de la psychanalyse est claire,le féminin est bien bien plus révélé par l'homme, que par le fait d'enfanter. Merci Jacqueline. A 62 ans, je suis une femme épanouïe et ma filiation se fait par l'écriture. De toute façon, mon nom se serait évanoui dans l'histoire de nom de famille de mon mari (le mien est" le saphir" en annagramme.
M
Je suis cette Ophélia très mûre psychologiquement mais qui a toujours craint la déformation du corps au moment de la gestation, alors que je voulais un enfant. De méchantes marâtres me disait, tu as des hanches étroites (pas comme les africaines) et j'en ai déduis que mon corps n'était pas constitué pour être enceinte). Mais j'ai malgré tout vécu ma féminité à travers la peinture, l'écriture, la sculpture (désignés comme le domaine réservé aux hommes,...et la psycho-clinique pour travailler avec les enfants (comme anna freud). Quand à ma féminité, j'ai coupé la poire en deux et me suis identifiée à améloe Poulain (amusant je viens de prendre conscience que je suis sagitaire, n'ée un jour de shabbat et de pleine lune. Cet enfant que je n'ai pas eu est dans ma tête (quoiqu'il mes arriveé en 1984 et 2003 de r^éver d'accoucher d'un magnifique bébé; (on se rappoche du signe du cancer (éminement maternel et ma pleine lune s'y trouve,....). Comme la mère de socrate, j'accouche plutôt le mental,...Lire jacqueline Shaeffer: Comment le fémin vient au femme. Sa pratique de la psychanalyse est claire, bien plus par l'homme, que par le fait d'enfanter. Merci Jacquelien. A 62 ans, je suis une femme épanouïe et ma filiation se fait par l'écriture. De toute façon, mon nom se serait évanoui dans l'histoire de nom de famille (le mien est" le saphir" (en anagramme).
M
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> personnellement je trouve ce film très riche. Même trop de choses à dire, à débattre. Vos analyses sont cohérentes et très intéressantes. Pour ma part je fais le rapprochement du film avec l'histoire de l'Espagne. Vidal est la métaphore de la dictature (haine, violence, tortures, mort) Ofelia (celle de la République déchue en 1939, présentée comme une innocence, une enfant (jeune république qui a duré peu de temps) Franco a anéanti la République, Ofelia devait donc mourir à la fin. Cependant elle continue de vivre après sa mort. Pour moi il s'agit des traces laissées par la République, rappelons que l'Espagne est aujourd'hui une monarchie constitutionnelle doté d'un régime démocratique. Le petit frère est l'espoir de l'Espagne (la démocratie). Il a été mis au monde par la mère d'Ofelia (côté républicain) et de vidal (franquiste) et lorsqu'on se base sur l'histoire la transition démocratique en 1975 s'est faite grâce à ceux qui étaient pour la démocratie et à l'alliance avec les franquistes. Le petit représente donc bien le futur le renouveau de l'Espagne. Le monstre à deux mains parait peu effrayant si on le compare à Vidal. En effet monstre de conte Ofelia arrive malgré tout à lui échapper, il n'est visisble qu'à travers les yeux d'enfants. Alors que Vidal fait peur à tout le monde (aussi bien aux adultes qu'à Ofelia) et il se montre bien plus cruel malgré son visage humain (il réussira à la tuer). J'en conclus donc ici que le réalisateur a voulu montrer que les véritables monstres peuvent être tout simplement les hommes (les dictateurs par exemple)
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